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Thinking the Unthinkable in Europe by Dani Rodrik

Les problèmes rencontrés par l’Europe actuellement traduisent sans doute un manque d’ambition ou de projets communs réels depuis l’avènement de l’Euro. Il faut aussi rechercher les causes de cette situation dans l’absence d’outils ou d’équipements qui permettraient à l’Union de faire face aux situations houleuses qu’elle rencontrent et notamment dans le cadre de la gestion des crises d’endettement. Il s’agit ainsi pour l’Europe de savoir se transcender, de dépasser ses pulsions individuelles pour penser l’impensables…L’article de Dani Rodrik nous y invite en tous les cas : Thinking the Unthinkable in Europe.

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La nécessité de la réforme ne doit pas cacher l’exigence d’équité !

En ce jour de septembre 2010, l’évènement en France est à n’en pas douter ceux de l’ouverture à l’Assemblée Nationale des débats sur la réforme des retraites et des manifestations (envisagées comme importantes) prévues un peu partout dans le pays. A La Réunion, la mobilisation a battu son plein à Saint-Denis comme à Saint-Pierre. Plusieurs milliers de personnes sont venues déclarer leurs inquiétudes diverses sur cette thématique des retraites. Prenons un peu de recul pour poser quelques éléments qui font débat et qui apparaissent au coeur des préoccupations d’une large part de nos concitoyens :

  • Le premier, et qui ne fait pas débat, est la nécessité d’une réforme afin de sauvegarder un régime par répartition mis à mal par les mutations socio-démographiques de notre société : la question qui demeure est quelle réforme ou comment réformer ?
  • Le deuxième (et quitte à se répéter) est la nécessité de sauvegarder le régime par répartition. On voit mal comment en pleine crise financière et boursière nos responsables pourraient miser notre avenir entièrement sur le régime par capitalisation. Cela n’écarte pas l’idée d’un possible mélange (il a déjà lieu) mais garantissant au moins un minimum ;
  • Le troisième valable au niveau national comme sur le plan local est de concevoir une réforme dont les sacrifices seront équitablement répartis. Si personne aujourd’hui en France ne doute qu’il faille adapter la France aux nouvelles dimensions internationales, ces mutations doivent cependant être savamment dosées pour maintenir le pacte républicain, la cohésion de la société et notre architecture sociale. En d’autres termes, il s’agit de dégager ce sentiment d’injustice qui plane au-dessus de la présente réforme. Plusieurs éléments viennent appuyer cette impression.
    • D’abord, l’apparence que seuls les salariés seront mis à contribution. Certes on peut comprendre que c’est au travailleur de s’assurer contre ce risque qu’est celui de la vieillesse et de ses vieux jours. Sauf que le travailleur ne génère pas uniquement que des salaires mais aussi des profits, bénéfices, dividendes et plus généralement des revenus du capital…Dans une société solidaire, il nous apparaît souhaitable que ce facteur, certes mobile, soit mis à contribution pour pallier au financement d’un des grands axes de notre société républicaine. Et puis n’oublions pas qu’à côté des salariés sont aussi concernés beaucoup d’artisans ou de petits entrepreneurs dont les situations sont également très préoccupantes notamment dans cette période de crise mais aussi lorsqu’on se projette sur le futur.
    • Ensuite, se pose le problème de la durée de cotisation et du recul de l’âge de départ à la retraite. Qui oserait s’élever contre l’argument : « comme nous vivons plus longtemps, nous devons travailler plus longtemps ». Cela est sans doute vrai. Mais cela pose plusieurs défis : passer de la dimension quantitative à la dimension qualitative. Ce n’est pas travailler plus mais plutôt travailler mieux ! En outre, A quoi cela sert-il de repousser l’âge de départ à la retraite si déjà, dans les âges d’aujourd’hui, le taux d’emploi des séniors est très faible par rapport à d’autres pays. Ainsi, optimisons déjà la force de travail actuelle (ce qui sous tend de la formation, de l’exigence auprès des entreprises,…) ce qui génèrera de nouvelles recettes…En fait, au-delà de l’argument facile, on comprend que modifier par la loi l’âge légal s’avère être plus pratique que d’entamer une vraie réforme de fond qui prendrait plus de temps et que nos différents responsables n’ont jusqu’ici jamais entreprise. En effet, seuls l’accroissement du taux d’emploi et la réduction du chômage conduira à augmenter de façon significative les recettes et de réduire les tentations à agir uniquement sur l’âge. Mais cela ne se décrète pas.
    • Enfin, pourquoi ne pas oser toucher à certains leviers fiscaux. On pense bien évidemment à la TVA. Sur ce plan l’argument fatal est l’injustice de cette forme d’impôt du fait de sa non progressivité. Mais, rien n’empêche de différencier certains secteurs (permettant d’épargner par exemple les produits de première nécessité et de taxer davantage les produits « polluant »). De plus, la TVA permettrait de renforcer sur le territoire national la compétitivité des produits domestiques.
  • Le quatrième est associé à La Réunion. L’actuel réforme pose en effet localement plusieurs soucis. Faire un simple copier-coller du projet débattu à l’assemblée ne serait pas sans danger.
    • D’une part, toute réforme, quelle qu’elle soit doit se préoccuper du long terme pour La Réunion et sauvegarder, voir construire notre paix sociale. Or dans le contexte de notre île, où une grande part de la population active est encore au chômage, cette réforme risque de conduire pour plusieurs décennies un grand nombre de réunionnais au minima, si ceux-ci sont maintenus. Face à de telles perspectives moroses (votre avenir serait fait sur le court terme du chômage et sur le moyen et long terme de revenus indécents), le risque de dislocation grandit dans une île comptant bientôt un million d’habitants.
    • D’autre part, et de façon concomitante, les dispositifs en termes d’âge semblent être ici sans effet puisque le taux de chômage actuel important réduit fortement le nombre d’annuités ou serait sans effet pour une large part de la population concernée par une chômage structurel et de long terme. C’est un peu comme les réductions fiscales. Quand vous ne payer pas d’impôt cela ne vous fait aucun effet !
  • Le cinquième concerne également La Réunion. Face à  un tel contexte, pourquoi ne pas envisager une réforme qui prenne en considération les spécificités de notre île ? Difficile vous me direz ! Mais, cela s’est pourtant fait lorsqu’on a voulu favoriser l’arrivée de capitaux ou les investissements à La Réunion à travers la création de plusieurs outils (défiscalisation, TVA-NPR,…). Deux poids de mesures ? Après tout si favoriser l’investissement dans notre île est une façon de la construire, édifier un système d’assurance contre le risque vieillesse qui maintienne la paix sociale est aussi une autre manière aussi noble de construire l’avenir de notre île. Car, des équipements ou des outils industriels sans habitants ou sans consommateurs seraient également inutiles…

Ces cinq éléments n’entendent pas bien évidemment dresser un portrait exhaustif des problèmes posés par l’actuelle réforme. Ils visent à nourrir notre débat. L’économiste que je suis oscille entre la logique économique et la logique sociale. Mais je reste aussi attaché à la stabilité sociétale de mon pays La France et de ma région La Réunion. En fait ces quelques éléments permettent de soulever un couvercle pour mettre à jour les limites associées à une trop grande précipitation à vouloir adopter le projet actuel en l’état, même si répétons nous, la nécessité de « réformer » la France s’impose. Mais cela ne doit pas la conduire à être « réformée » car, disloqué, notre pays verrait sa situation être dégradée. Espérons que les débats qui auront lieu dans les prochains jours permettront de modifier cette réforme pour qu’elle puisse davantage sur le territoire national dans son ensemble comme à La Réunion continuer à garantir une de nos libertés individuelles fondamentales : s’assurer dignement contre le risque de fin d’activité en dernière période de vie.

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L’Europe : à la recherche d’un nouveau souffle !

Nous savons que parmi les dossiers stratégiques nationaux figure celui de la relance européenne. L’union Européenne connaît effectivement aujourd’hui une période atone qu’on qualifierait de « sans projet »…sauf celui visant à écrire le futur document stratégique « Europe 2020 ». Dans ces perspectives nous savons que l’avenir de l’Europe, et donc notre avenir, se joue sans nul doute sur une partition politique…Effectivement quelle gouvernance politique pour une Europe qui devra répondre aux défis du milieu du siècle ?

Mais la dimension politique n’est pas le seul élément de la relance du projet européen. La composante économique est également importante. Car, depuis l’avènement de la monnaie unique, aucune grande « avancée » notable n’est apparue ce qui ne peut que nourrir qu’une impression d’essoufflement et de questionnement sur la réelle finalité d’une telle organisation de 500 millions d’individus. En effet, pourquoi tant de sacrifices si les bénéfices espérés ne sont ni visibles, ni palpables et si l’Europe qu’on nous dit protectrice se révèlerait n’être qu’un frêle bouclier. Aussi, toute réflexion qui permet de redonner un nouveau souffle et/ou un nouveau sens à la construction européenne est la bienvenue.

Dans ce cadre on est bien content de lire les réflexions de Michel Barnier, Commissaire européen au marché intérieur. Vous y trouverez un ensemble de proposition pour établir le « nouvel acte » du marché unique tant attendu. Ce renforcement du marché intérieur étant vue comme une des pierres angulaire de la réussite de la « stratégie Europe 2020 » ! Si la communication de ce projet a mobilisé 9 commissaires européens, on est quelque peu soucieux, au niveau des RUP, de constater que celui en charge de la politique régionale n’y était pas. Encore une fois le fait que la singularité des RUP ne soit pas prise en considération dès le début des réflexions pose toujours ensuite le problème de la débauche d’énergie pour convaincre Bruxelles du bien fondé de nos positions.

A côté de cet oubli à réparer, le texte se veut toutefois rassurant puisqu’il se donne, entre autres, comme objectifs de mettre en place « une économie sociale de marché fortement compétitive…au service des consommateurs. L’offre n’est par ailleurs pas oubliée puisque ce projet entend non seulement résorber les distorsions fiscales par une meilleure coordination des politiques publiques mais aussi cibler les pme pour leur permettre un meilleur accès aux outils de financements (création de bourses régionales par exemple…).

Au total, cette communication devrait être présentée le 6 octobre et être adoptée avant la fin de l’année 2010.

Pour les personnes désirant avoir plus d’informations sur les obstacles au marché intérieur je vous conseille le document de travail : (doc_trav_obstacle_marché_intérieur)

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Le pouvoir économique doit-il être indépendant du pouvoir politique ?

En matière de gestion de la politique monétaire, il est admis que la politique monétaire d’une banque centrale doit être indépendante des autorités politiques. Plusieurs travaux de recherches et plusieurs économistes l’ont démontré. Ainsi c’est sur cette base que se fondent les statuts respectifs des banques centrales américaine (La FED) et européenne (la BCE). Les discussions demeurent toujours ouvertes sur les règles que doivent suivent ces institutions pour établir leur politique monétaire mais ces discussions sont pour l’instant closes sur la question de l’indépendance (Il est vrai qu’en France, cette question a toujours été l’objet de vifs débats et je vous renvoie vers les enjeux qui ont traversé la dernière campagne présidentielle).

A l’instar de ce qui est préconisé en politique monétaire, il semble bon de se poser la même question sur le lien entre les pouvoirs politiques et les instances syndicales. Cette question est actuellement posée pour le lien affiché par l’un des candidats à la Présidence du Medef et l’actuelle majorité de La Région. On pourrait également faire référence au lien qui pouvait exister entre certaines visions de la CGTR et de l’ancienne majorité régionale. Néanmoins, certaines actions de ce syndicat de salariés ont aussi démontré que celui-ci pouvait faire preuve d’indépendance.

Au total, est-il bon de pouvoir s’afficher tout autant comme ayant le soutien d’un pouvoir politique en place pour une organisation…même patronale ? Le débat reste partagé. Mais il pose la question plus générale du rôle des corps constitués et des organisations sociales dans notre pays et à La Réunion.  La réponse peut s’inspirer de ce qui est préconisé en matière de politique monétaire. Le pouvoir économique constitué en institution (syndicale ou patronale) doit pouvoir faire preuve d’indépendance. D’abord, il y va de l’efficacité de son rôle d’aiguillon, de défense ou d’éclairage des problèmes de notre société. Ensuite, le politique élu aux responsabilités doit rester le seul décideur afin de ne pas semer de confusion entre politique et technocratie (le politique est élu, le technocrate ne l’est pas). Cela est important pour la vivacité de notre démocratie. Si le peuple n’est pas satisfait par une politique (économique) il doit pouvoir identifier le responsable afin de le remettre en cause lors d’une échéance électorale. Enfin, pour que le terme de politique économique puisse prendre sa pleine signification, il doit illustrer une vision portée par le politique et non par des instances agissant dans l’ombre. Il en va de la crédibilité de l’action du politique et de celle de l’économique. Et là, il s’agit d’une leçon d’économie politique !

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